Grève des scénaristes à Hollywood

Les scénaristes se mobilisent massivement pour défendre leurs droits face à l’intelligence artificielle et revendiquer leur part des bénéfices de leurs créations. Rencontre avec Jeff Faustman, qui travaille comme compositeur de musique dans l’industrie cinématographique à Los Angeles. Découvrez son point de vue sur cette lutte qui pourrait changer le visage de l’industrie du cinéma.

Depuis le 4 mai, les scénaristes américains ont entamé une grève pour protester contre leurs conditions de travail et de rémunération, tout comme en 2007, lorsque les syndicats avaient organisé une grève de 100 jours. Aujourd’hui, les scénaristes font face à une précarisation de leur situation, avec des séries diffusées sur des plateformes de SVOD et des programmes réduits à des saisons de 6 à 13 épisodes, ce qui réduit leur salaire. Les membres du syndicat WGA réclament notamment une revalorisation de leurs salaires, un encadrement plus clair de l’intelligence artificielle, une rémunération plus juste selon le succès d’une série en streaming, mais aussi un changement radical de la pratique des mini rooms, qui sont des conditions moins favorables pour les scénaristes. 

Mini rooms : un service low-coast ?

Les mini rooms sont des pôles de scénaristes de deux à trois personnes qui travaillent à l’écriture de plusieurs épisodes, en dehors d’une writer’s room classique. Les scénaristes qui y sont embauchés sont moins nombreux, moins payés et ont moins de temps pour écrire le même nombre d’épisodes. Les mini rooms sont également utilisées par les studios pour réduire le coût de la rémunération des auteurs, en leur payant le taux minimum de la WGA (Writers Guild of America) avant même la validation des projets. 

Ainsi, ils peuvent déterminer le potentiel des scripts sur plusieurs épisodes et s’assurer de trouver une ou deux séries à diffuser parmi les quatre ou cinq pour lesquelles le travail d’écriture a été effectué. Bien que pour les scénaristes qui ne reçoivent pas le feu vert pour leur projet, les mini rooms peuvent offrir une alternative peu coûteuse pour tester leurs idées ou donner aux débutants une opportunité de travailler, cela signifie également qu’ils ont travaillé pour rien. Les scénaristes perdent aussi l’avantage d’être associés à la série en tant que producteurs, ce qui peut avoir un impact négatif sur la qualité de la narration en cas de modifications ultérieures des scénarios. 

En réponse à cette situation, la Writers Guild of America a demandé une augmentation de 25% des salaires des scénaristes embauchés pour les mini rooms, ainsi qu’un minimum de six scénaristes pour une période de travail de 10 semaines consécutives, dont trois semaines prévues par épisode. Le syndicat a également demandé que la moitié des employés des mini rooms soient embauchés pendant la production. 

Les studios, représentés par l’AMPTP, ont rejeté ces demandes et n’ont proposé qu’une augmentation de 5% pour les mini rooms embauchant plus de trois scénaristes pendant moins de dix semaines avant la saison 1 d’une série. 

« Tous les grands studios, qu’ils soient syndiqués ou non, finiront par être affectés »

Jeff Faustman, compositeur à Los Angeles

Jeff Faustman est compositeur de musique dans l’industrie cinématographique à Los Angeles. En ce moment, il travaille principalement sur des bandes-annonces, la plupart du travail portant sur des films déjà existants. « Si la grève dure longtemps, je commencerai à ressentir le ralentissement de la production. Je suppose que c’est là la différence : je suis en postproduction, tandis que les scénaristes sont en préproduction », me confie-t-il. 

En effet, l’effet domino de la grève va se répercuter sur toute l’industrie. L’inquiétude du compositeur américain est compréhensible. 

« Cependant, tous les grands studios comme Marvel ou Paramount, qu’ils soient syndiqués ou non, finiront par être affectés, car les films en production seront interrompus. »

Le président Joe Biden a exprimé l’espoir que les scénaristes en grève à Hollywood parviendront rapidement à un accord équitable, car cela a des répercussions sur la production cinématographique. Les projets en cours prennent du retard, notamment le préquel de Game of Thrones, A Knight of the Seven Kingdoms: The Hedge Knight, dirigé par George R. R. Martin. Bien que la production ait déjà commencé, l’issue de la grève reste incertaine. Martin a exprimé son soutien au mouvement de grève sur son propre blog.

Espérons très vite que les scénaristes de Hollywood écrivent leur propre happy ending à cette grève qui agite le milieu du cinéma.

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